Eléments

samedi, mars 24, 2012

♫ Mozart requiem - III. Sequenz: Lacrimosa

Ah ! c'est dans les dangers qu'il faut observer l'homme, c'est dans l'adversité qu'il se révèle : alors seulement la vérité jaillit de son coeur ; le masque tombe, le visage réel apparaît.                                                                           (...) Pareils aux enfants qui tremblent et s'effraient de tout dans les ténèbres aveugles, c'est en pleine lumière que nous-mêmes, parfois, nous craignons des périls aussi peu redoutables que ceux dont s'épouvantent les enfants dans les ténèbres et qu'ils imaginent tout près d'eux. Ces terreurs, ces ténèbres de l'esprit, il faut donc pour les dissiper, non les rayons du soleil ni les traits lumineux du jour, mais l'étude rationnelle de la nature. Et toi, tu hésiteras, tu t'indigneras de mourir ? Tu as beau vivre et jouir de la vue, ta vie n'est qu'une mort, toi qui en gaspilles la plus grande part dans le sommeil et dors tout éveillé, toi que hantent les songes, toi qui subis le tourment de mille maux sans parvenir jamais a en démêler la cause, et qui flottes et titubes, dans l'ivresse des erreurs qui t'égarent.                                                                                                                                                             (...) L'un se précipite hors de sa riche demeure, parce qu'il s'ennuie d'y vivre, et un moment après il y rentre, car ailleurs il ne s'est pas trouvé mieux. Il court a toute bride vers sa maison de campagne comme s'il fallait porter secours a des bâtiments en flamme ; mais, dès le seuil, il baille ; il se réfugie dans le sommeil pour y chercher l'oubli ou même il se hâte de regagner la ville. Voilà comme chacun cherche a se fuir, mais, on le sait, l'homme est a soi-même un compagnon inséparable et auquel il reste attaché tout en le détestant ; l'homme est un malade qui ne sait pas la cause de son mal.
Lucrèce était un philosophe et poète latin  du 1er siècle avant JC adepte de l'école d'Epicure. Il considérait que la mort  est à l'origine des maux de l'homme car elle est pour lui un mal suprême donc inavouable le guidant bien souvent vers la passion, la destruction. Dans cet extrait de "De natura rerum", sa seule oeuvre inachevée visant à la révélation de notre condition humaine, il décrit avec une certaine beauté amère ce vain désespoir. 
L'homme est paradoxe par essence; Sans cesse tiraillé entre orgueil du pied de nez à la mort et autodestruction, 
sacrifice aux passions qu'elle engendre. Au final, on sait qui l'emporte, malgré tous les efforts
 qu'il peut déployer pour polir son être, le rendre plus supportable.
Récent Ancien Base