Je
suis dans une recherche de synthèse entre particulier et universel.
Pas qu'en politique, mais dans tous les domaines et particulièrement
en ce qui concerne la spiritualité, puisque cette polarisation a
vocation a être appliquée à l'ensemble de l'univers.
La
faculté de connaître ne s’exerce que dans le cadre restreint de
ce qu’un contexte ainsi que notre propre subjectivité nous donnent
à voir. En conséquence, on n'aime jamais les choses que par
l'entremise de ce que l'on connaît d'elles. Même si Dieu est en
nous en tant que fragment de l'unité qu'il subsume, on ne peut
l'aimer que par le biais du monde, car c’est à travers une
interaction initiale avec l’environnement que son existence
s’actualise en nous. Cette existence de Dieu n'est donc rien
d'autre à nos yeux que la conscience de l'unité à laquelle
participe le monde que nous-même en tant que matrice de cette
conscience.
C'est
ainsi que Dieu nous irrigue de sa vie, que l’on appelle aussi force
créatrice par sa présence en chacune des particules du monde. Nul
besoin de le chercher dans un ailleurs céleste, il est là, dans la
nature. A ce titre, le plaisir que nous avons à contempler cette
dernière est à considérer comme quelque chose qui est loin d'être
anodin. En effet, si ce plaisir est possible, et rien ne lui est
inégalable dans ce que l'homme a pu créer d'artificiel, c'est parce
qu'il est le fruit d'une adéquation originelle entre notre sens de
l'esthétique et la nature. L'art n'étant pour ainsi dire qu'un
produit dérivé de la nature, une composition à partir d'elle,
cette adéquation sera parasitée par le travail de la matière et le
plaisir qu'il suscitera en sera affaibli ; Bien que dans nombre de
cas il soit d’une intensité surprenante, puisque comme le constate
Kant, l'art a vocation à imiter les subtilités de la nature et avec
l'art moderne, à les évoquer. (d’où un attrait amoindri)
Il
y a autant de nécessité à être doté de la capacité d'éprouver
du plaisir à la vue de la nature qu'à celui de faire l'amour. Car
le plaisir a dans ces deux cas une fonction motrice s’inscrivant
dans la réalisation de finalités ayant un rapport plus ou moins
étroit avec la vie. L’une comme ravivement de l’existence de
Dieu existence en nous, l’autre comme perpétuation de l’espèce.
Les
tribus d'indiens d'Amérique, qui sacralisaient leur lieu de vie en
le percevant comme "terre mère" assumaient pleinement
cette nécessité de réactualisation de ce lien originel. En vivant
autant que leurs besoins de confort le permettait au plus près de la
nature, ils n'essayaient pas de l'agrémenter de quoi que ce soit, ou
pire de renier les règles qui président à ce lien comme
actuellement. Le terme "communauté de l'être" utilisé
par Francis Cousin est pertinent dans le sens où il renvoie selon
moi à un concept d’unité dont la sacralité imprégnant toute
culture commune est le ciment : Car la culture, qu’elle soit
intellectuelle ou historique, s’inscrit bien dans une réhabilitation
du lien originel en question. Il s'agit en effet d'une volonté
instinctive de remettre de la spiritualité dans le vivre-ensemble et
ce faisant reproduire l’interdépendance macroscopique qui règne
dans l'univers (au sein d’une constellation ethnique) à laquelle
chacun participe. C’est cela qui parachèvera la cohésion d'un
peuple.
La
communauté de l’être subsume en effet un peuple sous une unité
qui fait sens au regard de la structure du monde et de l’univers, a
contrario d’un libéralisme politique qui en empilant des unités
individuelles ou issues d’autres peuples comme des cartes n’a pas
vocation à aboutir à une harmonie cohérente ; L’unité en est
pour ainsi dire tronquée par une absence d’interpénétration des
membres du tout auquel elle renvoie elle-même due à une absence
d’homogénéité.
La
question de l’unité d'un peuple n'est en cela pas réductible à
une question de substance ethnique. En fait, celle-ci n’est à vrai
dire à considérer que comme son point de départ. D’elle émanera
en effet une culture qui, en tendant à réactualiser le lien
originel avec Dieu par la nature refermera la boucle. Particulier
ethnique et universel théiste en seront ainsi réunis.